Voitures électriques chinoises : l’Europe dit « oui » aux surtaxes
4 octobre 2024
Les pays membres de l’Union européenne ont donné leur feu vert à l’imposition de droits de douane supplémentaires sur les véhicules électriques « made in China ».
Article : Alors que la filière automobile du Vieux Continent traverse une crise, les pays membres de l'UE ont décidé, au terme d'une réunion ce vendredi matin, d'imposer des droits de douane supplémentaires aux véhicules électriques importés de Chine. Cette proposition de la commission « a obtenu le soutien nécessaire », souligne l'institution dans un communiqué. Celle-ci a désormais le champ libre pour mettre en œuvre ces droits de douane allant jusqu'à 35% sur les voitures chinoises, qui s'ajouteront à une taxe de 10% déjà effective. Ceux-ci doivent entrer en vigueur au plus tard le 30 octobre prochain.
Dans le détail, dix pays membres de l'UE ont donné leur feu vert à cette mesure. On y retrouve, sans surprise, la France et l'Italie. Mais cinq pays ont voté contre, dont l'Allemagne. Berlin craint des mesures de rétorsion de Pékin. L'empire du milieu constitue, de loin, le premier marché à l'export pour ses constructeurs automobiles, à commencer par Volkswagen, le numéro un européen. Pas moins de douze pays se sont, en revanche, abstenus.
Berlin redoute une « guerre commerciale »
Dans la foulée de cette décision, Pékin a, sans surprise, dit tout le mal qu'il en pensait. Le ministère chinois du Commerce a fustigé des « pratiques injustes, non conformes et déraisonnables ». Avant de se fendre d'un avertissement, précisant qu'il « préserverait les intérêts des entreprises chinoises ». Même son de cloche pour le constructeur Geely, qui a fait part de sa « grande déception ». Cette décision risque, selon lui, « d'entraver les relations économiques et commerciales entre l'UE et la Chine ». Craignant des représailles pour sa puissante industrie automobile, Berlin a, de son côté, appelé l'Europe à éviter toute « guerre commerciale » avec l'empire du Milieu.Bruxelles considère que ces nouvelles taxes constituent un impératif pour rétablir une concurrence équitable avec les constructeurs chinois, accusés d'être massivement subventionnés. L'Europe redoute, en particulier, une déferlante de leurs voitures électriques. Sachant que la Chine dispose d'une avance qui ne fait pas débat dans cette technologie, et en particulier dans les batteries. Ce qui permet aux constructeurs de l'empire du Milieu d'afficher des prix très inférieurs à ceux de leurs homologues européens.
Les surtaxes supplémentaires s'élèveront, in fine, à 7,8% pour Tesla. Le groupe d'Elon Musk fabrique, en effet, ses Model 3 et Y à Shanghai. Les voitures de BYD, un des constructeurs les plus agressifs sur le Vieux Continent, seront eux surtaxés à hauteur de 17%. Celles de Geely et SAIC (qui contrôle la marque MG) écoperont d'une surtaxe de 35,3%.
La porte n'est pas fermée
La Chine n'a pas ménagé ses efforts, ces derniers mois, pour influer le vote du jour. Dénonçant une démarche « protectionniste », Pékin a répondu en lançant des enquêtes anti-dumping visant les importations de porc, de produits laitiers, ou encore de cognac. Cette offensive a porté ses fruits - Pedro Sanchez, le Premier ministre espagnol, initialement favorable aux surtaxes, a notamment retourné sa veste après un voyage en Chine le mois dernier. Mais elle n'a pas suffi.Cela dit, les droits de douane européens restent modérés par rapport à ceux imposés par les Etats-Unis ou le Canada, qui s'élèvent à 100%. En outre, les constructeurs chinois les ont anticipés. Pour les contourner, beaucoup réfléchissent à fabriquer leurs voitures directement en Europe. Geely, par exemple, songe à ouvrir une usine en Pologne. BYD entend pour sa part produire des voitures à Szeged, en Hongrie, dès l'année prochaine. La Turquie, qui bénéficie d'un accord d'union douanière avec l'UE, pourrait prochainement accueillir des usines chinoises. Autrement dit, même avec ces nouvelles taxes, la porte n'est pas fermée pour l'industrie automobile chinoise.
« Monter des partenariats »
Dans l'Hexagone, la filière accueille plutôt favorablement l'initiative de Bruxelles. « Il faut être ferme sur les sujets de concurrence, et la Commission européenne a raison de mettre ces sanctions sur la table », a déclaré ce mercredi Luc Chatel, le président de la la Plateforme automobile (PFA), le lobby du secteur. « L'an dernier, une voiture électrique sur trois vendue en France etait produite en Chine », a-t-il insisté. Luc Chatel considère, toutefois, qu'« il va falloir monter des partenariats avec les Chinois », mais « avec des règles bien établies ». La France a selon lui à y gagner. L'ancien ministre rappelle que l'industrie automobile européenne a résisté à la vague des voitures japonaises dans les années 1970. Il estime que le pays a su tirer son épingle du jeu en permettant notamment à Toyota de bâtir une usine à Valencienne, la plus grande de l'Hexagone, qui produit notamment la Yaris Cross.Luca de Meo partage globalement cette ligne. Aux yeux du patron de Renault, il est nécessaire de trouver « des compromis avec les Chinois ». Le dirigeant juge qu'ils peuvent « apporter beaucoup » à l'Europe en matière de technologie, mais aussi sur le front des matières premières indispensables à la fabrication des batteries. Stellantis, de son côté, n'a pas hésité à toper avec le chinois Leapmotor pour commercialiser sur le Vieux Continent sa citadine T03 et son SUV C10, tous deux assemblés en Pologne. Carlos Tavares, le patron du géant franco-italo-américain, considère qu'il a, d'une certaine manière, plus à gagner à s'associer à des constructeurs de l'empire du Milieu plutôt que de se lancer dans un féroce bras de fer avec eux.
Voitures électriques chinoises : l’Europe dit « oui » aux surtaxes
Les pays membres de l’Union européenne ont donné leur feu vert à l’imposition de droits de douane supplémentaires sur les véhicules électriques « made in China ».
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