Extraterritorialité du droit américain : le grand « Hold-Up »
OPINION. Les entreprises du Vieux continent sont régulièrement mis à l'amende par la justice américaine, qui leur ponctionne des milliards au seul motif qu'elles effectuent, par exemple, des transactions en dollars. Il est urgent que l'Europe adopte des mesures protégeant ses intérêts, l'Oncle Sam ayant oublié qu'il existe un droit international.
Extrait : Un braquage de banque à 9 milliards de dollars. Que les inconditionnels de Netflix s'apaisent : il ne s'agit pas, hélas, d'une nouvelle saison de
La Casa de Papel. Mais bien d'une « histoire vraie », celle de la BNP Paribas,
définitivement condamnée le 1er mai 2015 par un tribunal de New York à verser à la justice américaine la somme record de 8,9 milliards de dollars. Le tort de la banque française : avoir contourné les blocus unilatéralement décrétés par les Etats-Unis à l'encontre de pays comme le Soudan, l'Iran ou Cuba. Une illustration aussi criante que désolante de
la toute puissance américaine en matière de règlement des conflits économiques, même et surtout lorsque ces derniers impliquent des acteurs non-étasuniens.
L'extraterritorialité, une « arme de destruction » massive
Victime de ce que les juristes appellent l'extraterritorialité du droit américain, BNP Paribas n'a rien d'un cas isolé. Sous couvert de lutter, on ne peut plus légitimement, contre la corruption, le blanchiment d'argent ou le financement du terrorisme, les Etats-Unis ont progressivement fait de leurs règles de droit une
« arme de destruction dans la guerre économique (qu'ils)
mènent contre le reste du monde, y compris contre leurs alliés traditionnels en Europe », ainsi que le déplorent les auteurs d'un
rapport parlementaire remis au Premier ministre Edouard Philippe en juin dernier.
On assiste ainsi, toujours selon ce document, à une
« prolifération de lois à portée extraterritoriale (...) permettant aux autorités de la première puissance mondiale d'enquêter, de poursuivre et de condamner (...) les pratiques commerciales d'entreprises et d'individus du monde entier ». Autant de procédures qui
« violent la souveraineté des pays dont ces (acteurs) sont ressortissants », conduisant à des sanctions
« disproportionnées » ne poursuivant pour seul but que de les
« fragiliser dans la compétition internationale ».
De fait, le tableau de chasse de l'Oncle Sam est « édifiant » et a de quoi donner le tournis. D'innombrables banques - BNP Paribas, Commerzbank, HSBC, Crédit agricole, ING, Bank of Tokyo, etc. -, mais aussi de grands fleurons industriels européens - Siemens, Alstom, Total, Volkswagen, etc. - ont ainsi eu affaire à la justice américaine.
En vingt ans, poursuivent les auteurs du rapport précité,
« plusieurs dizaines de milliards de dollars d'amendes ont été réclamés (à des entités étrangères) alors même qu'aucune de (leurs pratiques incriminées) n'avait de lien direct avec le territoire des Etats-Unis ». En 2018,
Royal Bank of Scotland s'est ainsi vue infliger une amende de 4,9 milliards de dollars pour ses mauvaises pratiques lors de la dernière crise financière - un comble, cette dernière s'étant principalement déclenchée en raison de l'incurie des banques... américaines. Même le célèbre secret bancaire helvète ne résiste pas à ce racket généralisé, le Crédit Suisse ayant écopé, quatre ans plus tôt, d'une
amende de 2,6 milliards de dollars pour avoir aidé plusieurs milliers de ses clients à frauder le fisc américain.
OPINION. Les entreprises du Vieux continent sont régulièrement mis à l'amende par la justice américaine, qui leur ponctionne des milliards au seul motif qu'elles effectuent, par exemple, des transactions en dollars. Il est urgent que l'Europe adopte des mesures protégeant ses intérêts, l'Oncle...
www.latribune.fr