Des fois que ça pourrait servir, voici ci-dessous un petit compte-rendu de ma virée à huangshan fin avril dernier.
Partis de Hangzhou en bus le 30 avril au matin ( il n'y a pas vraiment d'autres moyens de transports pour y aller ), on arrive à Tangkou vers 13h. Le bus nous dépose, ma femme et moi, au bord de la route. Pas d'arrêt de bus, juste comme ça, au bord de la route, on se retrouve là avec nos valises (obligé, car périple de 15 jours en Chine). On a réservé et pré-payé au Pine Ridge Lodge Hotel par internet, mais pour la nuit du 01 au 02 mai, on a l'intention de dormir là haut pour la nuit du 30 avril au 01 mai. On part donc à la recherche du Pine Ridge Lodge pour y déposer nos valises avant l'ascension.
Il est à ce stade utile de préciser que ni ma femme ni moi ne parlons chinois, je ne savais lire que quelques mots.
En marchant le long de la route, on se fait aborder par une femme qui, à force cris et gestes, nous fait comprendre qu'il faut contacter un certain Mr Hu. Et paf, justement le voilà qui passe en voiture et la femme lui fait signe de s'arrêter. Après discussion en simili-anglais, le Mr Hu nous explique que le Pine Ridge Lodge est fermé depuis des mois. Oh hasard ! Il est le propriétaire d'un hôtel dans le coin. Méfiant, je lui demande si on peut tout de même passer au Pine Ridge Lodge, il accepte. Nous voila donc embarqués pour quelques minutes de trajet en voiture qui nous amène effectivement face à un hôtel aux portes closes, avec chaînes et cadenas. Mr Hu insiste pour qu'on vienne dans son hôtel, j'insiste pour sortir de la voiture et lire l'affiche plastifiée attachée sur la porte, mais retournée.
Grand bien m'en a pris, l'affiche en chinois et en anglais précise que l'hôtel est en travaux, mais que les réservations sont assurées par un hôtel à 500m de là, 4 étoiles, avec le numéro de téléphone du gérant, un certain Mike, qui parle anglais. Ni une ni deux je lui passe un coup de fil, il dit de rester sur place et nous envoie une voiture pour nous chercher. Mr Hu n'est pas content de voir son client potentiel lui échapper, insiste lourdement, mais finalement abandonne quand arrive le coursier.
Les bagages déposés à l'hôtel, notre coursier nous amène ensuite à la petite gare des bus (enfin, une des gares des bus, on le découvrira plus tard) où on peut acheter nos billets de bus pour le 02 mai pour retour à Shanghai. C'est également à cette gare qu'on prend le départ pour Huangshan.
Nos sacs à dos sont prêts : 5 litres d'eau chacun, des fruits secs à profusions et divers biscuits, un vêtement chaud, une pseudo-carte de huangshan trouvée sur internet… rien de plus, c'est déjà assez lourd comme ça.
Pour une dizaine de kuais, le bus nous emmène pas loin de la billetterie (pas donné d'ailleurs). Forcément, deux laowai dont un géant d' 1m93, on ne passe pas inaperçu. Ca servira plus tard.
On attaque la montée par les marches de l'est. Les escaliers sont beaucoup plus étroits que ceux de Taishan, qu'on a monté quelques jours plus tôt. Mais ça se monte assez facilement.
A un tiers de la montée, des singes sont assis en plein milieu de l'escalier. On tente de passer tranquillement, je passe devant. Le singe se jette sur moi, entoure mon mollet de ses bras et tente de me mordre. Ca a de sacrés chicos ces machins là. Je suis contre la maltraitance des animaux, mais là pas le choix. Quelques coups de tatanes, je tiens le bestiau à distance pendant que madame passe. Un groupe de chinois qui descend observe la scène, très comique à leur yeux, mais ils se rendent compte rapidement qu'ils vont aussi devoir affronter la bête énervée. Une fois passés, quelques mètres plus loin, un chinois se met un pansement sur une vilaine morsure au mollet. J'ai eu de la chance d'avoir réagi suffisamment vite pour éviter pareille blessure.
Outre cette petite mésaventure, la montée se poursuit à bon train, il fait beau. Plus on monte et plus les petites pauses sont fréquentes, on boit, on grignote, on admire le superbe paysage, on avance. Après 4 heures de grimpette, on arrive en haut. C'est en haut qu'on voit un panneau disant « attention aux singes, ne jouer pas et ne nourrissez pas les singes ». Ils auraient mieux fait de mettre le panneau en bas !
Là haut, on se promène tranquillement, et on se lance à la recherche d'un endroit où dormir, si possible pas trop loin de l'endroit où on veut attaquer la boucle prévue le lendemain.
Et bien oui, visiter la Chine, c'est aussi laisser place à l'improvisation, on débarque là haut comme ça sans savoir où dormir. On avait fait pareil à Taishan, et on avait trouvé une chambre d'hôtel pour 200 kuais juste en « parlant » avec 3 chinoises qui nous ont aidés à trouver un logement, et qu'on a invité à dîner pour les remercier, sans parvenir à payer à la fin du repas. L'hospitalité et la gentillesse des chinois sont vraiment stupéfiantes. Pour Huangshan, le hasard a encore bien fait les choses. En pleine recherche d'un endroit où dormir, on tombe sur une des chinoises qui a pris le bus avec nous de Tangkou jusqu'à la billetterie. Comme on ne passe pas inaperçu, (d'ailleurs on n'a pas vu un seul autre laowai à huangshan) elle nous reconnaît, et on la reconnaît aussi. Elle ne parle pas anglais, mais mes deux mots et demi de chinois et quelques signes permettent de se comprendre. Elle nous explique qu'elle a fait la connaissance d'une autre chinoise pendant la montée, qui elle parle anglais. Elle l'appelle, cette chinoise est venue en voyage organisé (comme quasiment tous les chinois), elle téléphone à l'organisateur pour lui demander s'il peut aussi nous réserver des chambres en dortoir. On se retrouve donc en dortoir, dans une station de téléphérique (mais comment donc pouvait-on savoir que la station faisait dortoir ?) pour 200 kuais.
Après mille remerciements, on monte encore un peu pour aller voir le coucher de soleil, sachant que le lendemain on regardera pas le lever de soleil comme tous les chinois, parce que déjà fait à Taishan, parce que le programme du lendemain est très chargé donc on va se mettre en route de bonne heure.
Le soleil couché, retour aux dortoirs. Les hommes d'un côté, les femmes dans un autre dortoir. Après une bonne douche (inespérée, youpi!) et une bonne heure de discussion sympa avec un colocataire chinois parlant bien l'anglais, les vieux râlent, c'est l'heure de dormir (ben oui, 9h30, c'est déjà tard) en compagnie de 11 autres chinois sur « lits » superposés. Bon, la nuit est difficile. Ca ronfle, l'odeur de pieds est assez forte (tous n'ont pas pris une douche, loin de là), le « lit » est une planche en bois où il est techniquement impossible de caser mon 1,93m. Bref, la fatigue de la montée aide à somnoler environ 4 heures.
Il est 3h45, l'heure de se lever. Je ne suis pas le premier, les préparatifs de la grande migration vers le lever de soleil vont bon train.
Comme prévu, on laisse la marée humaine à moitié réveillée partir vers les points de vue, et on part, dans le noir, vers notre chemin du jour. Mais bientôt on s'arrête. Le jour tente lentement de se lever, et se produit alors une chose extraordinaire. Les oiseaux, jusque là silencieux, se mettent à siffler un air à 6 notes, tous les oiseaux le reprennent à tour de rôle, avec une autre espèce qui fait un contrepoint dans les graves. C'est envoûtant, tellement beau qu'on reste là, pendant un quart d'heure, à écouter cette symphonie dans ce cadre fabuleux. Les sons viennent de partout, résonnent sur les parois, les vallées, … on en prend plein les oreilles et on est heureux d'être là, seuls, témoins privilégiés, au lieu de tenter de regarder le soleil se lever au milieu d'une foule de photographes.
L'instant est magique, et éphémère. Dès que la luminosité ambiante est suffisante pour y voir bien clair, le chant cesse. Il est l'heure de repartir.
Le programme de ce 01 mai est de faire une grande boucle qui va nous faire tout redescendre, puis tout remonter pour arriver au marches de l'ouest, où on redescendra une nouvelle fois jusqu'à bus.
Ce qui fût prévu fût fait ! La descente est magnifique, avec des escaliers à flanc de falaise, suspendus au dessus du vide, des passages dans des grottes, des paysages à couper le souffle. La remontée fait mal, les jambes se souviennent des efforts de la veille, mais on tient bon. Le problème est que plus on monte, et plus la pente est raide. Hydratations, grignotages, reprises de souffle sont autant de poses bienvenues. Elles sont fréquentes, mais ne durent jamais longtemps, juste 15 à 20 secondes. Pas question de laisser les muscles refroidir.
La descente et la montée se font sans rencontrer âmes qui vivent. On se croit seul au monde, avec cette nature si exceptionnelle, un vrai bonheur.
Arrivé en haut, c'est retour à la civilisation. Avec la fatigue, on a l'intention de ne plus trop traîner et de redescendre rapidement. De toute façon, on a fait le plein de sensations et d'images gravées à jamais dans nos mémoires.
La densité de population augmente, il y a parfois quelques ralentissements, voire quelques bouchons (les chaises à porteurs n'aident pas), et il est bien utile de savoir lire 下山 afin de prendre la bonne direction vers la descente. Finalement arrivés en bas, exténués après 8 heures d'escaliers, mais heureux comme jamais, on aspire à revenir rapidement à l'hôtel pour prendre une douche bien méritée.
C'est sans compter sur le bus qui nous ramène à Tangkou, mais pas dans la même gare des bus qu'à l'aller. Cette fois-ci on se retrouve à la grande gare des bus, à 3km de l'hôtel. Finalement c'est tant mieux, ça sert de repérage parce que le bus pour Shanghai partira de cette gare-ci le lendemain matin. Après négociation avec le guichet d'accueil de la gare, un faux taxi nous ramène rapidement à l'hôtel. Douche, resto, visite rapide de Tangkou, retour à l'hôtel pour dodo.
Nous demandons à la réceptionniste de l'hôtel de nous réserver une voiture pour nous amener à la gare des bus le lendemain matin (avec les valises, c'est plus pratique). Le bus part à 7h20. Elle nous dit : « venez à la réception à 7h00 ». Puis elle se ravise : « non, venez à la réception à 6h20 ».
On ne comprends pas trop pourquoi, mais ok. Le lendemain matin, 6h20 pétante, on embarque en voiture pour la gare. Sauf que la gare n'est pas accessible en voiture, un cordon de policier barre la route. Notre chauffeur demande la raison aux policiers, puis nous fait signe qu'il faut descendre. On se retrouve alors avec nos valises… et des milliers de chinois !
Normal me direz-vous. Les 01-02-03 mai étant fériés, c'est la ruée vers Huangshan. Le 01 mai, ils partent des 4 coins de la Chine, arrivent le 02 pour aller dans les montagnes. Après deux jours au calme dans les montagnes, le changement est brutal. J'essaye d'imaginer ces milliers de chinois dans les escaliers étroits de Huangshan… ça va bouchonner sévère.
L'accès à la gare des bus doit alors se faire en faisant tout le tour du quartier, la rue fait 15m de large et s'est transformée en une gigantesque file d'attente d'un kilomètre de long. Tous les 50 mètres, 4 policiers tiennent une corde. La corde abaissée, tout le monde est sage et attend patiemment. Quand ils lèvent la corde, c'est la ruée, chacun pour soi.
Le temps passe, on commence à faire une croix sur notre bus. C'est sans compter sur l'efficacité des traitements des masses chinoises. La file avance, et on arrive finalement à monter dans notre bus quelques minutes avant son départ. Le bus part pile poil à l'heure, tant pis pour les retardataires. Chapeau à la réceptionniste de l'hôtel pour sa prévoyance !
En conclusion, Huangshan c'est vraiment à faire, ça vous laissera, comme à moi, des souvenirs à vie.