Comment la pandémie exacerbe la concurrence entre États européens par Romain Su Correspondant en Pologne pour Courrier international et Le Soir (Bruxelles)
15 mai 2020
« Si une entreprise a son siège fiscal ou des filiales dans un paradis fiscal, je veux le dire avec beaucoup de force, elle ne pourra pas bénéficier des aides de trésorerie de l’État », avait annoncé le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, à l’antenne de France Info jeudi 23 avril. Dans le secteur automobile, les aides pourraient même être conditionnées à la « relocalisation de certaines productions ».
Extrait : Ailleurs en Europe, comme au Danemark et en Pologne, « l’État n’aidera pas les entreprises qui font de l’évasion fiscale », a-t-on pu lire dans l’Obs. Dans le cas polonais, précise le magazine, les entreprises qui veulent bénéficier des aides doivent satisfaire deux critères : « ne procéder à aucun licenciement et payer des impôts en Pologne ».
Bien que de telles conditions paraissent de bon sens, elles témoignent en réalité de la compétition accrue à laquelle se livrent les États, y compris dans le cadre de l’Union européenne et parfois en dépit de ses règles, au prétexte d’atténuer les dégâts économiques qu’ils ont eux-mêmes provoqués en adoptant des mesures radicales pour lutter contre la pandémie (fermeture des frontières, confinement…).
Dans sa version initiale, le programme d’aide polonais était ainsi réservé aux entreprises dont les « bénéficiaires réels », c’est-à-dire les personnes physiques qui exercent un contrôle significatif sur l’entreprise ou sa société mère, notamment au travers de la détention d’actions, ont « leur résidence fiscale en Pologne et y ont déclaré leurs impôts au cours des deux dernières années d’exercice (si applicable). Il est possible de déroger à cette règle si le bénéficiaire du programme d’aide s’engage à transférer sa résidence fiscale en Pologne dans les neuf mois suivant l’attribution de l’aide ».
Deux observations doivent ici être soulignées. Premièrement, l’application du test de la résidence fiscale aux actionnaires, et pas seulement à l’entreprise proprement dite ou à ses filiales, élimine de fait les sociétés à capitaux étrangers qui sont pourtant créatrices de richesses et d’emplois en Pologne. Imagine-t-on les propriétaires des groupes Auchan, PSA ou Cargill déménager en Pologne pour que leurs filiales locales puissent profiter des aides du gouvernement ?
Suite de l'analyse >>>
15 mai 2020
« Si une entreprise a son siège fiscal ou des filiales dans un paradis fiscal, je veux le dire avec beaucoup de force, elle ne pourra pas bénéficier des aides de trésorerie de l’État », avait annoncé le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, à l’antenne de France Info jeudi 23 avril. Dans le secteur automobile, les aides pourraient même être conditionnées à la « relocalisation de certaines productions ».
Extrait : Ailleurs en Europe, comme au Danemark et en Pologne, « l’État n’aidera pas les entreprises qui font de l’évasion fiscale », a-t-on pu lire dans l’Obs. Dans le cas polonais, précise le magazine, les entreprises qui veulent bénéficier des aides doivent satisfaire deux critères : « ne procéder à aucun licenciement et payer des impôts en Pologne ».
Bien que de telles conditions paraissent de bon sens, elles témoignent en réalité de la compétition accrue à laquelle se livrent les États, y compris dans le cadre de l’Union européenne et parfois en dépit de ses règles, au prétexte d’atténuer les dégâts économiques qu’ils ont eux-mêmes provoqués en adoptant des mesures radicales pour lutter contre la pandémie (fermeture des frontières, confinement…).
Dans sa version initiale, le programme d’aide polonais était ainsi réservé aux entreprises dont les « bénéficiaires réels », c’est-à-dire les personnes physiques qui exercent un contrôle significatif sur l’entreprise ou sa société mère, notamment au travers de la détention d’actions, ont « leur résidence fiscale en Pologne et y ont déclaré leurs impôts au cours des deux dernières années d’exercice (si applicable). Il est possible de déroger à cette règle si le bénéficiaire du programme d’aide s’engage à transférer sa résidence fiscale en Pologne dans les neuf mois suivant l’attribution de l’aide ».
Deux observations doivent ici être soulignées. Premièrement, l’application du test de la résidence fiscale aux actionnaires, et pas seulement à l’entreprise proprement dite ou à ses filiales, élimine de fait les sociétés à capitaux étrangers qui sont pourtant créatrices de richesses et d’emplois en Pologne. Imagine-t-on les propriétaires des groupes Auchan, PSA ou Cargill déménager en Pologne pour que leurs filiales locales puissent profiter des aides du gouvernement ?
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Comment la pandémie exacerbe la concurrence entre États européens
Les conditions d’attribution des aides d’État violent la lettre et l’esprit des traités. / Romain Su
www.telos-eu.com