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"Les virus se sont développés avec le capitalisme", raconte François Lenglet
( En podcast pour les paresseux)
PUBLIÉ LE 18/02/2020 À 09:05
Apple a prévenu cette nuit que ses résultats allaient être amputés à cause de l'épidémie de Coronavirus, alors que Pékin durcit ses mesures de quarantaine. Et cela nous fait reprendre vos livres d’histoire..
Oui, figurez-vous que de tout temps, les virus se sont développés avec le capitalisme. Et pas seulement de façon dramatique. La fameuse épidémie de peste noire par exemple, qui a débuté en Europe en 1346, a littéralement ravagé la population européenne en tuant au moins un tiers des habitants. En Italie, c’est même la moitié de la population qui a disparu. Quant à la France, elle n’a retrouvé le nombre d’habitants d’avant l’épidémie qu’au 18e siècle, plusieurs centaines d’années plus tard !
Cette
épidémie a été la cause indirecte de la plus forte augmentation du niveau de vie du Moyen-Âge. Les salaires ont en effet explosé à cause de la pénurie de travailleurs. C’est à ce moment-là que le servage, cette forme d’esclavage économique, disparaît sous l’effet de la concurrence que se livrent les employeurs pour attirer les employés. Et parallèlement, les loyers s’effondrent, à cause de la demande qui chute.
Le virus a emprunté la route de la soie
Vous n’allez pas le croire : la peste noire arrivait du Hubei, la province chinoise dont la capitale est Wuhan, exactement là où a débuté notre épidémie du
coronavirus, bénigne en termes de mortalité si on la compare à la peste bubonique. Le virus avait alors voyagé par la route de la soie, qui reliait la Chine à l’Europe pour le commerce des fourrures et des épices. Les virus ont toujours emprunté les routes de l’argent et du commerce, ils ont prospéré grâce à la mondialisation, y compris dans ses formes primitives du Moyen-Âge. Et c’est aussi au moyen de ces virus que l’Occident a pris le contrôle des lointaines Amériques.
Tous les explorateurs européens ont emmené avec eux des maladies comme la variole, la rougeole, la polio, qui ont littéralement exterminé les populations nombreuses qui habitaient les Amériques. Ils transportaient des animaux porteurs de ces germes alors que les Aztèques et les Indiens d’Amérique n’étaient pas immunisés.
C’est cela qui explique que de toutes petites bandes armées, de quelques centaines d’aventuriers, comme celle de l’espagnol Cortez, aient pu prendre le contrôle d’un empire de plusieurs millions d’habitants en Amérique du Sud. En peu de temps, la population de ce qui est aujourd’hui le
Mexique a été divisée par dix à cause de la variole. Plus tard, lors de la conquête du Far West, c’est le chemin de fer qui a amené les virus et tué les Indiens, libérant le territoire pour les Blancs.
La domestication des animaux mise en cause
Ces maladies sont apparues lorsque l’Homme s’est sédentarisé et qu’il a inventé l’agriculture, et en particulier la domestication des animaux, car bon nombre des micro-organismes causant ces maladies viennent en fait des animaux. Leurs ravages ont été d’autant plus importants qu’avec une agriculture productive, on a pu construire des villes où les hommes vivaient de plus en plus nombreux dans une promiscuité favorisant la contagion. Une contagion qui s’est encore accrue avec les premières routes commerciales, celles de l’Empire romain en particulier, et qui s’est toujours faite à la vitesse où voyageait l’Homme, c’est-à-dire de plus en plus vite. L’épidémie est un malheur de l’homo economicus.